Bizarrement Imogen n’était pas la première levée ce matin, depuis un bon mois que toutes les premières années dormait ici, personne n’avait ouvert les yeux avant la matinale demoiselle Westonburry. Comme d’habitude Imogen avait ouvert les yeux en premier, mais au lieu d’aller s’habiller et petit-déjeuner elle avait passé la matinée dans son lit à réfléchir. Cette rencontre avec l’être de l’eau l’avait quelque peu chamboulée parce que pour une fois elle n’était pas la plus callée sur un sujet et elle n’avait aucune réponse à apporter. Rien qui ne pourrait l’aider ou lui faire comprendre. La poufsouffle soupira quand l’horloge sonna huit heures, il était encore trop tôt pour aller à la bibliothèque qui était fermée jusqu’à neuf heures trente durant les week-ends.

« Imo ? Comment ça se fait que tu ne sois pas debout ? » La jeune fille retint un sourire, son amie la connaissait par cœur et savait qu’il y avait quelque chose de louche derrière cette histoire. Un grand sourire aux lèvres Imogen passa la tête à travers son rideau pour regarder sa meilleure amie. « J’ai eu envie d’attendre la marmotte que tu étais aujourd’hui, tu viens manger ? »

« Imo ? T’as vraiment pas l’air dans ton assiette aujourd’hui en fait. » Zut, la jeune fille la connaissait vraiment trop bien, elle avait pourtant tout fait pour conserver les apparences mais l’être de l’eau l’inquiétait trop pour qu’elle soit tout à fait normale et sereine. Seulement Imogen ne voulait pas avouer sa défaite sur ce sujet, elle voulait en apprendre plus avant d’en parler, il fallait vite qu’elle trouve un mensonge et qu’elle se rende à la bibliothèque. Elle croisa le regard de son amie et sut qu’elle ne pourrait pas lui mentir, volontairement du moins. Une moue penaude se forma sur le visage de la jeune fille et elle décida d’avouer. « Il faut absolument que j’aille à la bibliothèque, ça me perturbe vraiment trop cette histoire. » Rester évasive était plutôt une bonne chose qui pourrait peut-être marcher, son amie ne lui répondit que par un haussement de sourcil mais la laissa s’échapper sans un mot. Une chance pour la première année qui n’attendit pas son reste et s’échappa bien vite de la grande salle encore endormie. Il n’était que neuf heures et quart, elle traina donc longuement dans les escaliers pour arriver le plus tard à la bibliothèque, même si elle est connu là-bas pour sa présence elle n’aime pas être la toute première impatiente devant la salle.

Enfin la jeune fille arrive dans le bon couloir et un sourire ne put s’empêcher de s’étaler sur ses lèvres lorsqu’elle remarqua que la porte était déjà ouverte. En bonne conquérante la poufsouffle marcha directement jusqu’au rayon qui l’intéressait ‘créatures’. En un mois à peine, Imogen connaissait déjà les rayons par cœur, il faut dire qu’elle est observatrice et qu’elle a plutôt une bonne mémoire. Bon, être dans le rayon est une bonne chose, maintenant il lui fallait trouver le bon livre. En remerciant sa petite taille, elle commença par les livres du bas et elle se promet qu’elle cherchera l’échelle plus tard.

Après une bonne heure de recherche, de lecture, de chamboule-tout (ah bah oui, les livres qui tombent ce n’est pas très drôle) et de patience, Imogen commençait à en avoir ras l’amphore –une expression apprise en Grèce qu’elle a tout de suite beaucoup appréciée– et à s’impatienter. Elle allait s’asseoir dans un fauteuil moelleux pour mieux remettre ses idées en place quand elle croisa la bibliothécaire. Et voilà ! C’était juste cela qu’il lui fallait. Gaiment elle se rapprocha de la jeune femme. « J’ai un exposé sur les créatures marines mais je ne trouve pas le document qui traite parfaitement de tout cela. » La bibliothécaire semble avoir un léger doute quand la véracité de ses propos : quel professeur fait étudier les êtres marins à ses premières années ?, mais Imogen n’avait pas envie de dire la vérité elle ne savait que trop bien que les adultes n’aiment pas que les enfants se mêlent des choses qui ne les regardent pas. Finalement le regard angélique de la petite blonde finit par jouer en sa faveur car la bibliothécaire desserra les bras pour apporter de l’aide à la jeune fille. Seulement après quatre ouvrages proposés, elle n’était toujours pas avancée car ce n’était pas ceux qu’elle souhaitait. « Je ne peux pas faire grand-chose d’autre pour vous mademoiselle, allez regarder sur le bord droit des étagères, la listes des livres est écrit dessus, peut être que cela vous plaira mieux. » Imogen acquiesça gravement et déçue elle alla voir cette fameuse liste.
« C’est CELUI-LA que je veux ! » ne put s’empêcher de s’exclamer à voix haute la jaune et noire quand elle découvrit le titre parfait : ‘créatures de l’eau, un peuple à la magie certaine’, elle sourit victorieuse même si elle se demandait comment elle avait fait pour le rater. Notant la référence, Imogen se dirigea vers le rang trois du quatrième étage mais rien à faire : l’emplacement était vide. « Et zut. » pensa-t-elle tout fort. Dans ses pensées elle redescendit un peu trop rapidement de l’échelle et cogna –sans trop de force non plus– une jolie jeune femme, qui semblait à serdaigle selon son écharpe. Imogen s’excusa platement et s’éloigna un petit peu.

Au bout de quelques secondes elle prit la parole. « Je peux t’aider si tu cherches quelques chose de précis, ça fait plus d’une heure que je fouille ce rayon, je commence à le connaître par cœur. » Un sourire éclatant aux lèvres, Imogen était prête à se faire une nouvelle amie.

☄ RedSky

Aubépine, cette nuit là, n’avait que peu dormi, à l’instar des nuits précédentes depuis la mésaventure arrivée à l’être de l’eau. Elle passait ses journées à parcourir la bibliothèque, plus particulièrement les étagères contenant les ouvrages sur les créatures magiques, dans l’espoir de découvrir ce qui pouvait bien leur être arrivé et dans le même élan le remède que l’infirmière ne pouvait pas trouver. Elle ne se surestimait, mais elle ne pouvait pas s’avouer vaincue, elle ne le voulait pas.

Elle connaissait le coin réservé aux livres sur les créatures par cœur. Depuis sept ans qu’elle se renseignait régulièrement pour diverses aventures dans le but d’en découvrir plus sur ces créatures qui restaient étrangères, voire indifférentes, aux sorciers, cette familiarisation avec le rayon n’avait rien d’étonnant. Malheureusement, une fois qu’elle avait emprunté les livres dont elle avait besoin, elle devait s’atteler à ses devoirs ou à l’entrainement nécessaire pour ses cours, d’autant plus qu’elle ne suivait non pas une ni deux options, mais trois. Une charge de travail supplémentaire, donc. S’en suivait des nuits blanches à lire les ouvrages qu’elle empruntait, et un coucher retardé.

C’était exactement ce qui s’était passé, une fois de plus. Seulement, bien que ça soit le weekend, elle n’avait pas pu prolonger son sommeil durant la matinée, ses colocataires Serdaigle ayant décidé d’être particulièrement bruyantes ce matin et désireuses de l’aide d’Aubépine pour s’habiller. Une histoire nébuleuse de chance de l’année pour Rose grâce à sortie à Pré-au-Lard avec un septième année très prisé des filles, semblerait-il, qui incarnait le fantasme de la plupart des filles de l’école. Aubépine avait donc été réveillée à 9h00 du matin, et s’était tournée et retournée dans son lit avant de se résigner à se lever, incapable de se rendormir malgré l’heure unique de sommeil qu’elle avait pu grappiller. Elle se leva donc et prit une longue douche.

Elle était passée par la grande salle, histoire de grignoter quelque chose, puis s’était assise dans le parc afin de lire quelque peu. L’heure matinale lui avait fait prendre son écharpe, pas forcément à raison, de peur d’avoir froid à l’extérieur. Elle ne put toutefois pas se concentrer, avait donc rangé le livre dans son sac et amené les autres volumes sur les êtres de l’eau qu’elle avait empruntés et déjà lus, histoire de les déposer en chemin, avant d’en sélectionner d’autres. Elle mit donc les pieds dans la bibliothèque aux alentours de dix heures vingt du matin, avec l’idée de récupérer Créatures de l’eau, un peuple à la magie certaine, qu’elle avait vu en rayon la veille, mais qu’elle avait du laisser sur place vu le nombre conséquent qu’elle avait déjà sélectionné.

Elle alla donc à l’accueil remettre ses livres à la bibliothécaire, qui la regarda exaspérée de devoir en ranger tant alors qu’Aubépine les avait seulement sortis de la pièce la veille. Comme si elle aurait plutôt souhaité être laissée en paix dans ses allées sombres et poussiéreuses… Aubépine appréciait la bibliothécaire, mais elle était quelque peu lunatique, et il n’était pas rare que ses sautes d’humeur exaspèrent la jeune Serdaigle, qui réfrénait tant bien que mal les remarques acérées qui lui venaient, tant l’employée se montrait conciliante avec elle en temps normal.

Elle la salua distraitement, une fois qu’elle eut noté le retour des livres, et se dirigea vers les rayonnages qui l’intéressaient, tournant et retournant à la recherche de sa proie, sans grand succès. Elle n’était plus là, elle devait définitivement s’y faire. Elle inspecta les étagères alentour, au cas où, sans plus de réussite. Sa baguette se trouvait dans la manche de sa robe de sorcière, qu’elle avait retravaillée aussi bien en extérieur pour la rendre plus jolie qu’en intérieur pour créer une cachette pour sa baguette. Elle la saisit en s’efforçant de ne pas la faire apparaître – peu importe la relation cordiale qui existait entre elle et les bibliothécaires, aucune d’elles ne verrait de bonne augure qu’une élève sorte sa baguette. Au mieux verraient-elles ça comme un moyen de mettre le désordre dans la bibliothèque… Au pire, surement un attentat contre leurs précieux volumes et leurs précieuses personnes. Elle lança un accio ‘Créatures de l’eau, un peuple à la magie certaine’ informulé, qui ne fut pas fructueux : il ne devait pas être présent.

Elle n’eut pas le temps de réfléchir davantage, heurtée par une élève qui descendait d’une échelle juste au-dessus d’Aubépine. Perdue dans ses pensées, la septième année n’avait pas remarqué la Poufsouffle, d’après le blason de sa maison sur sa robe, proche d’elle sur une échelle, et n’avait donc pas pu prévenir la collision. La petite, surement une première année, se confondit en excuses, et Aubépine lui sourit tendrement en disant que ça n’était pas grave du tout, jusqu’à ce que la petite s’en aille. Elle s’apprêtait elle-même à repartir sur ses pas, quand la demoiselle revint vers elle, et lui proposa son aide. De toute évidence, Aubépine n’en avait pas besoin, mais elle fut touchée de l’attention.

« Oh, c’est très gentil, mais je viens ici depuis sept ans maintenant, dans ces étagères en particulier, je commence à bien connaître. Je cherchais le livre Créatures de l’eau, un peuple à la magie certaine, il n’est de toute évidence pas ici. Surement emprunté par un élève. Mais peut-être puis-je t’aider ? Si tu es ici depuis au moins une heure, c’est que tu ne trouves pas ton bonheur. Je serai peut-être capable de dénicher le livre dont tu as besoin ! »

Aubépine continuait de sourire, bienveillante, espérant pouvoir aider la demoiselle.