Allongée sur le ventre, Lily dessinait avec patience et application. Une pâquerette dans la bouche, les jambes battant la mesure d’un rythme imaginaire. Evidemment, l’objet de ses dessins n’était autre que Shamless, son fléreur chéri. « Wanna Try Wanna Try. Nananana, na na na na » Contrairement à ses pieds, le rythme de sa voix n’était pas juste. Lily n’avait jamais été une grande chanteuse, et elle n’espérait pas l’être. La chanson lui était restée dans la tête et elle se traînait ce refrain depuis la matinée, bien contente de pouvoir le faire jaillir de son esprit. Une chanson qui vous hante, c’est comme un poison minutieusement inséré dans votre mémoire : ça vous hante, vous rend fou. Et Lily n’échappait pas à cette sanction, cette chanson devait sortir où elle allait finir totalement folle.

Il faisait froid aujourd’hui. Cette année, le mois de Novembre avait été particulièrement vigoureux. Si bien que les rares rayons offerts par le soleil étaient appréciable. Et grandement appréciés par la petite poufsoufflette, qui avait courut jusqu’au parc sitôt son déjeuner terminé. Il n’y avait rien de mieux qu’un bon moment calme passé à dessiner sous le soleil. Enfin, pas après un épuisant cours de botanique. Ceci expliquait d’ailleurs certainement la marque de boue qui sillonnait sa joue, sans que Lily ne s’en soit rendue compte et que personne ne lui en ait fait la remarque. Ah, elle était forte la franche camaraderie Poudlarienne…


« Nanananananana »


Battant la cadence encore plus vite, toute excitée par la chanson, Lily ne se rendait pas compte que le froid hivernal avait déjà pris possession du parc. Son emprise sur le petit corps de la jaune ne se faisait pas encore trop sentir et Elisabeth savourait donc ce temps libre passé à dessiner. D’ordinaire, c’était plutôt pendant les cours qu’elle avait l’habitude de gribouiller… Peut-être que Shamless lui manquait trop ?

Un coup de vent fit gigoter sa feuille pourtant fixement retenue par l’avant bras de la jeune fille. Ahaha, si elle croyait sincèrement s’envoler si facilement, c’était mal connaître la petite Blackburn ! Grommelant contre le maudit vent à l’aide d’une formule sympathique tel que « saloperie d’vent d’mes deux ouais ! Tu sais pas à qui t’as affaire vasy ! ». La jeune fille comprit assez soudainement, qu’elle n’était pas faite pour ce genre d’activités soignée et solitaire. Ceci dit, fière comme un paon, elle décida de rivaliser encore un peu avec le vent. Chez les Blackburn, on n’abandonnait pas si facilement, Oh oui, il en fallait bien plus pour leur faire jeter l’éponge !! Aussi, ce fut avec des mouvements bien moins appliqués et patients que Lily repris son ouvrage.

Le dessin de la jeune fille était un gribouillage qui n’avait rien d’extraordinaire. Si Lily avait un don, ce n’était certainement pas celui du dessin. Ceci dit, son ‘œuvre’ n’avait rien d’affreux. C’était un commun petit gribouillis. Une banale tête dessinée dans la marge lors d’un cours ennuyeux. Une petite esquisse à la va vite. Evidemment, pour l’impulsive demoiselle, tenir vingt minutes montre en mains sur le ventre avec autant de sérieux relevait déjà du miracle… (Et cela ne signifiait rien de bon pour le cours d’histoire de la magie à venir…)

A final, la mine de son critérium bien trop sollicité par les mouvements brusques de la jeune fille cassa sans que celle-ci ne s’en rende compte, ce qui eut pour effet d’abîmer son chef d’œuvre mais aussi (conséquence inévitable) de la mettre dans une colère folle. Balançant la totalité de ses affaires d’un geste rogue, elle attrapa d’un geste soudain ses dessins et écrasa la totalité de ses activités entre ses deux paumes. C’était toujours comme ça que tout finissait de toute façon…

Elle balança ensuite la feuille par-dessus son épaule et resta quelques secondes la tête entre les bras, essayant (assez vainement) de se calmer. Réalisant soudainement son geste elle se releva, et se mit à la recherche des papiers qu’elle venait de jeter.

Lily avait toujours était une fervente écologiste. Malgré son jeune âge, elle avait bien conscience que sa terre mère était importante et qu’il fallait en prendre soin. En général, elle appréciait toute personne capable du même altruisme envers la planète bleue. Elle respectait de même les quatre éléments. C’était ce soin et cette générosité envers toutes personnes qui l’avait mené à apprécier les mœurs des indiens d’Amériques très tôt dans sa vie. A vraie dire, son choix de vivre en végétarienne amoureuse de la nature lui était venu après une aventure des plus commerciale. Sa mère, moldue de naissance, avait cherché à lui faire partager les joies de sa jeunesse sans magie et lui avait ainsi très tôt fait découvrir les Walt Disney. Elisabeth qui était une enfant comme les autres (bien qu’un peu plus casse-bonbon que couette-couette) apprécia de suite ces chefs d’œuvre au service de la joie et du manichéisme. Mais particulièrement trois d’entres eux : La petite sirène (parce qu’elle avait toujours rêvé d’être un poisson et de faire sa vie ‘sous l’océan’ et qu’elle avait rapidement compris que la chanson disait vraie : ‘Chez les humains, c’est la pagaille’.), Aladin (parce que c’est le meilleur des Disney , parce que Jasmine et Aladin étaient les plus beaux et qu’elle aussi voulait découvrir ‘un monde aux mille et une splendeur’, ‘un nouveau monde en couleur’. Et qu’elle se voyait bien elle princesse, finir avec un petit voleur qui la sortirait de ce monde dans lequel elle ne se sentait vraiment pas à sa place), et Pocahontas, qui était indéniablement son préféré. Pocahontas était tout ce que Lily espérait pour l’avenir. Elle avait le droit (et le devoir) de grimper aux arbres, d’être une aventurière. Elle était forte, belle et courageuse. Et, elle respectait les éléments. En plus, elle avait plutôt intérêt vu que sa grand-mère était un arbre… L’air du vent l’avait particulièrement marqué. Et depuis elle avait fait de cette chanson une sorte de credo, de ligne de vie. « Tu crois que la terre t'appartient toute entière. Pour toi, ce n'est qu'un tapis de poussière. Moi je sais que la pierre, l'oiseau et les fleurs ont une vie, ont un esprit et un cœur ».

Voila pourquoi elle s’était ainsi maudite d’avoir si vilainement acharné sur sa pauvre feuille et qu’elle s’en voulait de l’avoir ainsi lancé. Son acte lui apparaissait comme insupportable. Elle se souleva et partit haletante à sa recherche. Ce fut à cette occasion qu’elle croisa Desmond Sheppers. Un gryffondor qu’elle connaissait de nom. A vrai dire, Lily devait connaitre une bonne partie de l’école. Son caractère franc et curieux l’avait rendu apte à connaitre chacun. Que le jeune homme la connaisse ou non lui importait peu. Ils ne s’étaient jamais adressés la parole et elle ne le connaissait que parce qu’il s’était passé elle ne savait trop plus quoi avec Stephan et Kyle etc. Elle lui sourit cependant. Le pauvre semblait dans une position délicate. Couché par terre sur le sol couvert de neige. Elle s’en approcha donc dans le but de l’aider, espérant ainsi pouvoir retourner rapidement à ses recherches. Il lui semblait impossible de passer, d’assister à un tel spectacle et de partir sans faire le moindre mouvement pour ce pauvre élève. Si bien que c’était avec naturel qu’elle était venue l’aider.

Elle allait lui demander de ne pas bouger quand le garçon commença à parler. Elle referma son caquet, jurant cependant qu’elle déverserait bientôt son lot habituel d’insanités et de bêtises. Pour une bavarde comme Lily, garder sa bouche fermait était toujours un exercice difficile. Et si elle s’y prêtait avec joie dans un monde aussi élitiste et restrictif que celui des banquets, il lui semblait impossible d’agir avec la même parcimonie de retour à l’école. L’école n’était-il pas le lieu ou l’on devait se former, se libérer afin d’évoluer ? Bon ben voila. D’ailleurs, en parlant de se libérer. L’esprit de Lily venait soudainement de perdre un poids énorme : On avait retrouvé sa boulette. Elle n’était donc plus hors la loi vis-à-vis de sa politique écologique. Voila qui la mettait soudainement de bien meilleur humeur, ce qui ne l’empêchait cependant pas d’être toujours en colère face à l’affront de la rétractation de la mine de son critérium… ( ). Elle sourit au garçon, attrapa la boulette qu’il lui tendit avant de la fourrer dans son sac. Et revint à nouveau sur lui dans le but de l’aider à se relever.

« Waaa… Merci ! T’as retrouvé mon gâchis c’est génial. Je l’ai lancé par-dessus mon épaule par dépit. J’avoue qu’il aurait mieux valu que je le fasse pas. Tu sais qu’écologiquement une feuille de papier peut-être néfaste. Bon, évidemment pas autant que…genre un emballage plastique c’est sur, mais quand même. D’ordinaire, j’te jure j’essaie de faire attention à pas salit la Terre. C’est très mauvais de salir la terre. Genre, est-ce que chez moi je laisserais mes boulettes de papier par terre, non je pense pas. Alors c’est pareil et tout non ? Tu crois pas ? D’un autre coté, c’est vrai que c’est pas non plus chez moi que je peux recycler mon papier… Donc bon. Hey ! D’ailleurs, en parlant de ça, tu crois pas qu’à Poudlard il pourrait organiser un compost !? ça s’fait ça non ? » C’est tout en récupérant la boulette de papier et alors qu’elle la rangeait qu’elle avait laissé ses paroles filtrer. Voila, au moins maintenant le garçon était fixé, il savait sur quoi il était tombé : Une pipelette. Elle réalisa soudainement qu’il fallait qu’elle l’aide et en revint à Desmond. « Oh… Attends ! Je vais t’ai… » Mais le garçon semblait n’avoir que faire de son aide. C’est dans une mécanique assez particulière qu’il décida de se relever. En tout cas, il était dorénavant trempé, et il devait avoir assez froid.

Citation :

« Hum, je suis Desmond, le sauveur de boulettes de papiers. »

« Bah… Ouais ! Je sais qui t’es. T’es un gryff, un grand même. T’es le copain de la meuf blonde qu’est partie l’année dernière non ? Elle était genre malade c’est pas ça ? Enfin… Moi mon nom c’est Lily ! Enfin Elisabeth en fait mais je préfère Lily, c’est mieux, non ? Je suis la cousine de Leen. Tu sais la Serpentarde vachement bien gaulée que tous les mecs veulent se faire ? Mmmm ? Je sais pas si t’es très pote avec les Serpentards toi ceci dit… Ah, oui, merci pour la boulette ! C’était vachement cool de ta part. Vraiment désolée qu’elle t’ai agressé ! Je la gronderai sévèrement si tu veux avant de la mettre à la poubelle tout à l'heure. Et sinon… T’as pas genre archi froid !? T'as du te gameler violemment quand même. C’était trop drôle ahah. J’me suis demandé si t’étais pas un peu fou quand j’suis arrivée et que j’t’ai vu genre normal couché par terre dans la neige. Tu sais qu’y’en a vraiment des timbrés dans cette école !? Enfin bon, tu veux pas rentrer ? Sinon si tu veux j’te prête ma baguette et tu lances le truc pour ce sécher plus vite ? Ma mère f’sait toujours ça quand on sortait du bain avec mon frère. Seth Blackburn, tu connais ? C’est un Poufsouffle aussi en 6éme année ? Mmm ? Ah… Oui moi aussi je suis à Poufsouffle d’ailleurs. Avec Stephan. Enfin… On devrait peut-être arrêter de parler de moi pour se concentrer sur le mec qui est en train de se transformer en bonhomme de neige ambulant… ça va, t’arrives toujours à bouger les bras ? Tes p’tits doigts sont pas tombés ? Parce que tu sais, il parait que ça arrive ! Ils gèlent, ils gèlent et puis crack ! Y’en a plus ! »

Oh, elle pouvait continuer encore comme ça pendant un bon moment encore. Lily avait toujours des choses à raconter. Des anecdotes, des questions, des choses qu’elle avait lues. Tout lui semblait être un probable sujet de conversation. Mieux valait pour Desmond qu’il commence à s’y faire et qu’il se décide à l’interrompre, sinon le pauvre rouge et or finirait aussi congelé que le lac…