Aubépine était à la bibliothèque, toujours en quête d’un ouvrage qui pouvait la renseigner sur les souffrances des autres de l’eau et, éventuellement, l’aider à les soigner. Mais elle n’en pouvait plus, de tourner en rond ainsi. Surtout en sachant que les autorités, suspicieuses, ne l’autorisaient pas à s’approcher de la rive du lac pour les questionner. Soupirant fortement et claquant subitement le livre qu’elle consultait pour le refermer, s’attirant des regards noirs, elle se dirigea vers le bureau de la bibliothécaire pour emprunter le livre et partir de ce lieu qu’elle aimait énormément.

Déambulant dans les couloirs, elle croisa un fantôme qui lui semblait perdu dans ses pensées. Comme à son habitude, elle fit un grand sourire, saluant le fantôme… qui se retourna comme pour la regarder d’un air morne et peu engageant qui donna des frissons à Aubépine. Elle n’eut pas le temps de le questionner qu’il repartait à travers un mur, où la jeune fille ne pouvait donc le suivre. Si seulement elle connaissait un sort pour se dématérialiser et traverser les murs ! Mais elle ne pensait pas que ça existait.

Secouant légèrement la tête pour enlever une mèche de cheveux qui passait devant ses yeux, elle se reconcentra sur le vrai problème : que se passait-il, avec les créatures magiques ? Avec la magie tout court, si l’on y ajoutait les escaliers qui n’étaient pas vraiment des créatures magiques… Quoi que, peut-être Poudlard recensait-il plus de secrets qu’on ne le pensait, et peut-être les escaliers n’étaient-ils pas seulement ensorcelés, mais bel et bien vivants ?

Elle avait déjà souhaité interroger les tableaux, auparavant, mais sans succès : leur magie les quittait déjà, ils avaient tellement de difficultés à parler qu’elle ne pourrait pas obtenir d’informations d’eux. En revanche, les fantômes… Eux, ils pourraient lui répondre ! Après tout, si Peeves semblait frappé de mutisme, ça n’était pas le cas des autres ! Ils se comportaient bizarrement, certes, mais ils n’étaient pas muets. Elle le savait, elle les avait croisés en se rendant en cours. Elle aurait bien voulu les interroger à ce moment-là, mais son professeur n’aurait surement pas accepté son retard… Bien qu’elle ne soit pas effrayée par une énième retenue de plus.

Aubépine était essoufflée d’avoir couru dans le château pour suivre les traces de sang et ne pas laisser s’échapper le Baron Sanglant, à qui elles appartenaient surement. C’est soulagée qu’elle était tombée sur lui, littéralement, et avait essayé de l’interroger. Sans grand succès, toutefois. Il flottait devant elle, dans le vide. Son visage était-il en train de sa matérialiser, lui aussi, et sa bouche fantôme ne lui permettait-elle plus de parler ? se demanda t’elle. Surement, quelle aurait pu être la cause pour qu’il refuse de parler ? Il l’aurait peut-être remise à sa place, en temps normal, mais il ne l’aurait pas ignorée.

Elle baissa les yeux sur sa robe de sorcière… Une robe de sorcière qu’elle avait ensorcelée pour être beige, trouvant trop sinistres les robes habituelles et n’étant tenue à aucun code vestimentaire en dehors des cours. Celle-ci était teinté d’un rouge qui lui donnait un certain style, trouvait-elle. Peut-être aurait-elle pu en faire le motif de sa prochaine création ? Si quelqu’un l’avait vu comme ça, il aurait fuit, remarquez. Mais elle était seule… seule avec ses pensées et avec le Baron Sanglant pris dans un mutisme étrange.

Ce mutisme allait-il frapper tous les fantômes, un à un ? Aubépine frissonna à cette pensée. Quelle perte ça sera pour Poudlard ! Des ombres de fantômes ! Voire des fantômes consistants qu’on ne traverserait plus ! Qui ferait attention à ne pas heurter de plein fouet quelqu’un qu’il avait toujours connu comme un fantôme ? Et quel serait le mal-être des fantômes si cela venait à être ainsi ?

Elle s’apprêta à repartir, réalisant soudain qu’elle ne pouvait laisser le pauvre Baron seul ici. Elle tenta de le saisir, sans grand succès, sa main passant à travers la manche du fantôme perdu.

« Suivez moi, s’il vous plait, Monsieur le baron. »

Suite à cela, elle se mit à marcher d’un pas vif, ne se retournant pas réellement pour regarder si le Baron la suivait, de peur qu’il ne le fasse pas. Elle l’espérait cependant. Ses pas la menèrent dans un cachot.

Aubépine s’était donc éloignée vers les cachots, dans lesquels elle remarqua que le Baron ne l’avait pas suivie. Mince alors ! C’était pourtant son lieu de prédilection, non ? Ne le qualifiait-on pas de fantôme des Serpentard. Surprise par ce silence dans les cachots, elle revint sur ses pas, se dirigeant vers l’aile est du château sur une impulsion. Elle eut, semble-t-il, plus de succès qu’avec sa visite aux cachots : Peeves se trouvait là ! Peut-être lui répondrait-il, lui, à défaut d’en avoir eu de la part du Baron ?

Plus elle approchait, plus elle remarquait qu’il avait une attitude étrange. Où se trouvait l’être hyperactif, en train de préparer sa nouvelle bêtise, titillant les élèves avec un sourire malicieux constamment plaqué sur son visage ? Quelqu’un l’avait-il drogué, pour qu’il soit amorphe et endormi comme cela ? Il flottait, comme s’il était mort dans son sommeil et n’en était jamais sorti depuis. Quelqu’un en aurait-il eu plus qu’assez de cet esprit farceur imprévisible ? Pourtant, quelle source de fraicheur il était. Aubépine était prête à défier tout élève qui dirait qu’il n’avait pas au moins une fois rit des farces de Peeves. Qu’il était agréable de le voir s’amuser comme cela, sans craindre quelques représailles que ce soit. Il fallait dire que punir un fantôme n’était pas chose évidente. La jeune Serdaigle était effarée de l’état dans lequel se trouvait Peeves, inquiète pour lui.

Reprenant un chemin différent, bien décidée à forcer le Baron à parler… Elle s’approcha de lui, constatant qu’il la dévisageait. Etait-ce ses aller et retours dans le château qui lui avaient causé un teint rouge inconvenant pour le fantôme dont la pâleur aurait fait mourir d’envie bon nombre de jeunes filles ayant vécu à une époque révolue ? Elle aurait pu conclure que oui, s’il ne s’était pas mis à parler. Enfin !, pensa-t-elle.

Jeune Serdaigle, je ne puis répondre à ta première question. Mais tu me sembles déterminée. Vas donc voir la Dame Grise, elle seule pourra te dire ce qu'il se passe ici. Moi, je me tais.

« Sois sans crainte, Baron, je trouverai ce qui ne tourne pas rond ici ! Je vous sauverai. Vous resterez ou redeviendrez tels que vous devez être. Je vais de ce pas débusquer la Dame Grise et la questionner, en espérant qu’elle saura me répondre. »

Sans attendre plus longtemps, Aubépine partit en courant dans les étages. Après tout, le lieu de prédilection de la Dame Grise était normalement la tour de Serdaigle. Peut-être la rencontrerait-elle sur le chemin ? Et si ça n’était pas le cas, elle n’aurait qu’à chercher ailleurs.